« Tu as coupé à un nombre conséquent d’enterrements, petite veinarde. Tu as échappé à tous ces coups qui un par un nous assomment et nous laissent comme des boxeurs groggy dans l’attente du gong final, tu as échappé aux plaintes et aux gémissements, partie avec sagesse et un brin de désinvolture dans la pleine force de tes vingt ans, nous laissant aux tracas des deuils, des héritages, de l’absence, des tristes lendemains. »
En publiant Une amie de la famille, récit centré sur la mort de ma sœur Annie et le silence qui dès lors a enseveli ma famille, je n’imaginais pas que ce livre allait provoquer tant de réactions, révéler tant de coïncidences, amener tant de retrouvailles, de surprises, de découvertes. Tous ces signes attestaient de la puissance de l’écriture, de ce qu’elle rend possible, de ce qu’elle délivre ou dénoue. Alors j’ai décidé de dire à Annie ce que les vivants m’ont raconté d’elle, de lui montrer à quel point elle est restée présente. Je lui confie ma vie faite de rencontres, de livres écrits ou lus. Je mêle mes traits aux siens et à ceux des amis disparus. « La vie des morts », disait notre père, persuadé que sa femme et sa fille continuaient de lui parler. Ce n’était pas un songe de vieillard, c’était la simple vérité. J.-M. L.
Jean-Marie Laclavetine est romancier, éditeur chez Gallimard, traducteur de l’italien et animateur d’ateliers d’écriture qui ont lancé des auteures remarquées dont Leila Slimani, Joffrine Donnadieu et Maylis Besserie.
Vous étiez nombreux autour de lui lorsque nous l’avions reçu en chair et en os pour Et j’ai su que ce trésor était pour moi .
L’an dernier, à cause des grèves et des conflits sociaux, suivis de près par le confinement et notre soumission aux contraintes sanitaires, nous avons commencé par reporter à trois reprises notre rencontre avec lui pour Une amie de la famille, récit qui a donné naissance à une écriture plus éloignée de la fiction et plus centrée sur le vécu. Et ce n’est pas n’importe quel vécu puisque, dit-il, c’est la mort de sa soeur, emportée par une vague à l’âge de 20 ans, qui a donné naissance à l’écrivain qu’il est devenu.
En attendant de pouvoir nous retrouver en toute convivialité, sans crainte de la proximité, autour d’un buffet oriental, je ne vous remercierai jamais assez de continuer à me témoigner votre fidélité en suivant ces rencontres Zoom. Votre support me conforte dans mon énergie pour poursuivre ces dialogues avec les écrivains.
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